L’obscurité qu’on lui reproche [la poésie] ne tient pas à sa nature propre, qui est d’éclairer, mais à la nuit même qu’elle explore, et qu’elle se doit d’explorer : celle de l’âme elle-même et du mystère où baigne l’être humain.
Saint-John Perse

 

Résidence à Clisson _ juin 2017

Projet B2 // Résidence Dessin
mai-juin 2017 // Clisson

 

Le projet « B2 » propose un lieu de résidence pour des projets d’écriture, de créations littéraire, artistique, scientifique ou de recherche, dans un environnement paisible à Clisson (Loire-Atlantique).

Clisson est une petite ville traversée par deux rivières : la Sèvre et la Moine.
J’y suis allée chercher le calme et un certain isolement. Deux semaines en immersion dédiées au dessin.
Je ne connaissais pas la ville et ses environs. Mon séjour fut naturellement rythmé par les croquis en extérieur et par les séances de dessin à l’atelier d’après croquis et photos.

 

Une première image

Au cœur du village se trouve un immense saule pleureur surmonté d’un château.
Cette image est je pense le point de départ (et la synthèse) de ce qu’allait être le rendu du travail de la résidence. Nature et architecture ne font qu’un et prennent la forme onirique « d’un château chevelu ou barbu ».

En parallèle au bâti néoclassique d’inspiration italienne, se dresse le château de Clisson.
Édifié par la puissante famille de Clisson à partir du XIIe siècle, il est incendié pendant la guerre de Vendée (1793-1796). Aujourd’hui, ce site offre encore de nombreux exemples d’architecture défensive.
Je n’ai pas su résister, ni cherché à résister, à l’attirance de ce lieu. Vu de l’extérieur, il est dominant, encore défensif, il regarde loin devant. De l’intérieur, c’est la fragilité qui l’emporte, les vestiges d’après les combats, les ravages du feu, les cris des vendéens du fond du puits.

 

La dernière image

La centrale à béton (1960) de Trentemoult découverte à Rezé près de Nantes et je bouclais ma série !
Ce site a été investi par un artiste suisse Romain Signer. Son œuvre a tout de suite attirée mon attention. Un pendule de 7 mètres de long s’accroche au bâtiment. Cette horloge sans aiguille, marque la lente déchéance du bâtiment, la course inéluctable des êtres et des choses vers leur disparition.
J’ai gardé du site l’image de la centrale et de son caractère imposant même si vouée à disparaître. Comme le château, elle eut ses heures de gloire et comme lui, elle garde les traces d’un temps révolu.

 

Artifices et nature

Les bords de Sèvre ont été aménagés par le sculpteur François-Frédéric Lemot entre 1805 et 1827.
Dans le bois de la Garenne Lemot, il crée une suite d’espaces évoquant l’antique Paradis perdu, le Moyen Âge et l’Histoire. Il fait s’élever une maison de style rustique à l’italienne, une villa néoclassique et des « fabriques » ornementales… (voir https://grand-patrimoine.loire-atlantique.fr)

Les dessins intitulés Diane, Héloïse, Les rochers Rousseau et Delille sont directement inspirés de ces aménagements.

 Héloïse           Bain de Diane

 

Je remercie chaleureusement Jean-Paul et Brigitte Borleteau pour leur accueil à Clisson ainsi que
Catherine et Bruno.

 

Monotypes

La technique du monotype m’intéresse pour deux raisons :
– Premièrement pour la qualité plastique de l’image imprimée : la sensualité du papier Hahnemühle associée au travail de la presse donnent à la fois profondeur et douceur aux noirs.
La lumière m’interroge. Plus le noir est profond plus la lumière est puissante et canalisée.
– Deuxièmement le monotype laisse une place importante à l’inattendu dans la création, ce qui pimente le processus.

 

Téléchargez la version pdf  Book Dessins et Monotypes 2015 WEB

→ Série « Que la lumière soit »

Les monotypes de cette série sont un éloge de la lumière. Le noir est à l’honneur et occupe l’espace jusqu’à le saturer parfois. L’homme ou l’animal n’ont pas leur place dans ces images.

→ Série « Hors série »

Les représentations humaines ou animales sont présentes : homme méditant, fragment de pied, l’aviateur qui fait pendant à la vue de l’astéroïde B612 du Petit Prince, les volatiles, le baiser (référence à Brancusi).
Les souvenirs alimentent cette série. Tout ce qui ne peut être classé dans « Que la lumière soit » trouve sa place dans « Hors série ». Ce sont des images qui semblent constituer le début  une histoire latente .

 

Dessins

→ Réalités absentes

Elles sont une part de nous, de ce que nous portons en nous, une réalité plus ou moins enfouie. Refoulée mais pourtant si vraie et souvent associée à un phénomène exacerbé comme le rejet, le cri, la blessure.

→ Natures exubérantes et Graminées (2014-2015)

Ces dessins interrogent des représentations ambiguës, aux frontières des sphères du vivant, de l’humain du minéral et du végétal. Exubérante, la nature l’est ici par sa couleur mais aussi par ce qu’elle offre, dévoile ou exhibe. C’est une nature piquante ou velue. Parfois elle se fait moins douce et se montre tourmentée.

→ Clouds Variations

Le nuage (variation d’un rocher de René Magritte) est l’archétype des Clouds Variations.
Les nuages ne sont-ils pas des figures de projections ?
Qui n’a jamais contemplé les nuages à la recherche de représentations du réel ?

→ Les Stations

Hier, j’habitais cette maison…
Aujourd’hui, je l’explore dans ses plis et replis. Elle devient « Station ».
Parmi les différentes définitions du mot Station dans le Larousse, je retiens celle-ci : « Lieu de séjour temporaire permettant certaines activités ou certains traitements », à la différence pour moi, que ce lieu ne favoriserait pas l’activité mais plutôt la contemplation et le repos.
Les Stations sont les refuges de l’âme et du cœur.
Le chemin qui les relie est balisé de Bornes.
Le dessin apaise l’âme.

 

AU FER ROUGE

Le regard qui jettera sur mes épaules
Le filet indéchiffrable de la nuit
Sera comme une pluie d’éclipse
Il descendra lentement de son cadran solaire
Mes bras autour de son cou
Ralentir travaux – 1930 – P.Eluard-A.Breton-R.Char.

 

Gaufrages et typogravures

→ Gaufrages

Les monochromes procèdent de la dissimulation et utilisent le mot, le motif ou l’objet comme perturbateur de la surface colorée. De près, il fait sens. De loin, il disparaît.
En 2011, je trouvais dans la maison de ma grand-mère un petit napperon ovale au
motif floral. Il prit place dans mon atelier dans l’attente d’un devenir.
Je décide de rechercher d’autres napperons circulaires. Certains sont plus ou moins altérés par le temps, déformés, déchirés. Chaque napperon est à nouveau altéré, non par le temps mais par le dessin. En l’état, ils sont le souvenir, la mémoire ; par le détournement que j’en fais, ils sont
l’instant présent, l’image contemporaine de ces «Femmes», mon actualité.

Série de quatre impressions en gaufrage sur vélin d’Arches blanc, 250g, 40x50cm, 30 exemplaires chacune, numérotées et signées.

→ Typogravures

La couleur s’inscrit dans le creux du papier. Eloge de douceur et de délicatesse.
Série de quatre impressions en typographie de 30 exemplaires chacune, numérotées et signées.

 

Sérigraphies

Je propose dans cette série trois versions de l’image du couple qui parle de la relation à l’autre, du déplacement du face-à-face vers la fusion.

→ Couple

J’ai repris ici le dessin d’une toile intitulée « Tentations ». La masse colorée n’est pas sans rappeler la fusion charnelle.

→ Rapprochement

J’opère un rapprochement, celui de la Duchesse et du Duc d’Urbino de Piero Della Francesca, couple mystérieux presque énigmatique à mes yeux. Je « brode » par de petits points rouges les profils de cette femme et de cet homme si longtemps éloignés l’un de l’autre! L’opération de rapprochement fait basculer le couple dans une autre temporalité, la mienne. Celle de mon couple dont le Baiser est le trait d’union.

→ Le Baiser

Le baiser est le rapprochement de deux profils contemporains.
La fusion des deux visages éloigne le motif de sa représentation première.

 

Monochromes

Le rouge m’accompagne depuis quatre ans.
C’est une couleur fortement connotée mais je ne retiendrai de sa symbolique que la fougue, le dynamisme, la force et l’incontournable passion.
Empreinte et monochromie sont les maîtres mots de mes recherches. Utiliser la couleur en grande quantité, la donner à voir pure pour la voir autrement. La plasticité de la matière opaque et fluide à la fois m’intéresse. De ces caractéristiques premières, j’extrais la monochromie et la coulure.
Dès 2008, de petits objets, figurines ou mots, se dissimulent sous la couche épaisse de peinture. Ces créations procèdent de cette dissimulation et utilisent le mot comme perturbateur de la surface colorée. De près, il fait sens. De loin, il disparaît.
Les thèmes abordés sont le féminin, notre écosystème, les « déluges » tant climatiques que socio-économiques, la démence de l’homme face à la nature. Sans oublier l’espoir d’un possible et tant attendu retour à la Raison.

→ Présentation de Marée noire et Elles pour l’exposition Transmission
Ces deux toiles sont présentées en vis-à-vis. Un dialogue s’installe.
Elles sont construites sur le même schéma : composition centrée et chaos environnant.
Elles associent la stabilité du centre (napperon et Marée Noire) à la puissance débordante de l’écriture et de la matière.
Elles oscillent entre force contenue et force dévastatrice.
Elles cherchent, fouillent, vont et viennent, nous mettent en tension.

 

Diluviennes

Les Diluviennes sont l’association de l’eau et du geste. L’écran opaque s’affine. Découle un univers vaporeux, voluptueux ou tumultueux. Le rouge se libère, le rose apparaît. La coulure passe du rouge au blanc. La coulure matière, aujourd’hui est absence. L’orage gronde, l’eau avale tout sur son passage… La force de la Nature est en œuvre.

 

Dessins photographiques

Les dessins photographiques sont réalisés sur papier photo argentique. L’image apparaît par contact du révélateur et du fixateur sur le papier. L’empreinte ronde est la matrice de ces univers organiques. Elle renvoie à l’origine, au chaos. De 2007 à 2010, le dessin étant absent de l’univers rouge, il domine ici dans les dernières créations, comme une nécessité.

 
Back to top